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ISABELLE ISTE, l’art de poser le voile

 

D’emblée, lorsque l’on fait face aux œuvres d’Isabelle Iste, ce qui emporte, ce qui marque ou trouble, c’est cette présence blanche, cette ouate évanescente en touche d’éclaircie finale, couvrant tous ses tableaux ou presque. Comme si la lumière devait toujours l’emporter sur l’obscur.

Sa cartographie artistique joue avec l’éther, la terre, l’eau, qu’elle anime et confond en une alchimie de feu, un combat purifié par cette omniprésence blanche.

Ces écumes claires se font vapeurs ou brumes, voire vagues qui semblent submerger quelque chose d’antérieur. Cette force émotionnelle évidente et lyrique se fond parfois avec les autres tracés aux pigments plus vifs, qui par contraste se subliment entre eux.

Les flous invitent à se reconnecter avec un monde de sensations que l’on pensait oubliées. D’autres fois, des objets échappés d’une toile d’Yves Tanguy semblent errer entre deux eaux troubles derrière tant de brouillard volontaire.

Mais l’impression qu’une première Å“uvre a été en partie couverte, effacée, demeure. L’étendue blanche, linceul d’une pièce condamnée ?

Serait-ce le moyen de cacher un souvenir trop révélé, ou s’agirait-il de voiler avec mesure le monde intérieur de l’artiste, pour en offrir une version plus hermétique, laissant libre cours à l’imaginaire du spectateur ? Suggérer, évoquer, plutôt que tout livrer ? C’est ici bien plus riche.

L’œuvre d’Isabelle Iste a tout d’une chambre avec vue onirique ; cependant les rideaux de la fenêtre sont tirés de peur d’en montrer trop.

La démarche de l’artiste paraît résider dans cette obligation de ne pas révéler l’image, afin de pouvoir poursuivre une quête permanente vers l’achevé, nécessairement et intrinsèquement sans fin. Comme une forme d’autocensure indispensable à l’effort créateur, la seule permettant un mouvement de fuite en avant, condamnation perpétuelle à la manière d’un Sisyphe.

L’œil aventureux saura déchirer le voile, tout en se laissant porter par les élans aériens qui traversent les travaux d’Isabelle Iste.  Ce sont des abstractions lyriques atypiques, légères, où soufflent des brises aux courants qu’emprunta parmi d’autres un Zao Wou Ki ;  le regard s’y plaît à flotter en toute liberté, et s’y perdra avec jubilation…

Isabelle Iste vit et travaille en région parisienne. Elle peint depuis plus de vingt ans.

 

Jean-Henri Maisonneuve

 

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